Depuis plusieurs années, les associations alertent sur la souffrance psychique des personnes exilées, une réalité souvent invisible et donc oubliée. Pourtant, un rapport du Comité pour la santé des exilés (Comede) de 2016 révélait que 62 % des personnes accueillies avaient été victimes de violence, 14 % de torture et 13 % de violences liées au genre et à l’orientation sexuelle, avant ou pendant leur migration.
Né en 2007, le centre de santé Essor s’adresse à ces personnes exilées en souffrance psychique et aux victimes de violences intentionnelles et de tortures. Parmi les patients accueillis, 47 % sont des femmes. « Il n’y a pas vraiment de troubles genrés, spécifiques aux femmes, précise d’emblée Elise Haquart, l’une des psychologues du centre. Toutefois, il existe des problématiques spécifiques aux femmes. ». Parmi celles-ci, les violences conjugales, qui poussent de nombreuses femmes à fuir, et les violences sexuelles, notamment en situation de conflit ou de post-conflit. « Il y a également des femmes qui essayent de s’extraire de réseaux de traite d’êtres humains, notamment celles originaires du Nigéria », explique Elise Haquart. Quant aux principaux troubles dont souffrent les femmes, ce sont souvent les mêmes que les hommes : troubles du sommeil, anxiété, dépression, troubles cognitifs (difficultés de mémorisation ou de repérage), isolement. « Ce n’est pas de l’ordre de la maladie psychiatrique. Ces troubles sont en lien avec des choses vécues et qui n’ont pas été digérées », précise la psychologue.
Un lieu de confiance
Situé à Villeurbanne, le centre Essor est un service de l’association Forum Réfugiés-Cosi, agréé centre de santé par l’Agence régionale de santé. Il propose un accueil pluridisciplinaire, avec la présence de médecins généralistes, de psychologues, d’un psychiatre, d’un kinésithérapeute et d’une art-thérapeute. « Les personnes reçues passent au départ un entretien d’accueil et d’évaluation avec un médecin et un psychologue. Ensuite, tous ensemble, nous décidons du parcours de soin le plus adapté », indique Valérie Abjean, la cheffe de service du centre. « La spécificité du lieu, c’est le travail avec les interprètes professionnels. Nous faisons appel à eux à chaque fois que c’est nécessaire », poursuit-elle. L’accompagnement consiste essentiellement en des consultations, individuelles ou familiales, associées à quelques ateliers collectifs. En moyenne, les patients sont suivis 15 mois par l’équipe. « Mais bien sûr, une moyenne ça ne veut rien dire, nuance Valérie Abjean. Il y a des personnes qu’on verra deux fois et ça ira mieux. D’autres pendant 4 ans, car c’est un lieu où elles se sentent en confiance. »
Parmi les autres thématiques plus spécifiques aux femmes, on note toutes les questions liées à la grossesse et à la maternité. Nombre de ces femmes ont fait le choix de partir pour leurs enfants. « Il y a donc beaucoup d’investissement pour que ça se passe bien. Et en même temps, c’est très difficile de faire naître et d’élever ses enfants quand on est loin de ses proches, de son groupe d’appartenance, de ses repères habituels. Cela crée beaucoup de désarroi, d’autant plus quand, soi-même, on ne va pas bien », explique Elise Haquart.
Reconstruction
L’obtention des papiers, et avec, l’assurance d’une plus grande stabilité, semble être un élément essentiel de la reconstruction des personnes en souffrance psychique. « Même s’il y a évidemment d’autres éléments, comme la réunification familiale, l’autonomie, le travail, ou au moins, le sentiment de trouver sa place dans la société d’accueil », raconte la psychologue. « On voit aussi, bien sûr, des belles réussites, même si cela demande du temps. Des personnes qui arrivent à trouver des nouveaux départs, à retrouver une famille, un projet professionnel, une stabilité, conclut Elise Haquart. On le voit heureusement tous les jours. Et ça donne du sens à notre travail. »
Ramadan Bozhlani, Mohanad Al Sayed,
Raphaëlle Vivent
English summary The Essor health centre in Villeurbanne, France, helps people in exile |
Përmbledhje në shqip Qendra shëndetësore Essor në Villeurbanne, Francë, ndihmon njerëzit në mërgim të cilët kanë përjetuar trauma. Mjekët, psikologët dhe terapistët ofrojnë konsulta falas, të hapura për të gjithë në moshë mbi gjashtë vjeç. |
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